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- Le Pr. Basile Magiste Mulière, spécialisé dans l'étude comparative des comportements sociaux et amoureux chez l’homme et le crocodile, est l'inventeur de la psycho-anthropomorphie comparative. Il propose une conférence au cours de laquelle il se raconte et se révèle un redoutable prédateur. -

Selon l’expression populaire consacrée « verser des larmes de crocodile » désigne la manifestation d'une fausse émotion qui a pour objectif de tromper l'autre. Au-delà de cette expression, utilisée de nos jours bien plus comme une injonction infantilisante, le crocodile apparaît comme une figure idéale pour illustrer la violence sourde et latente. Issue d'une blessure tapie dans les entrailles mais convoquée au moindre stimulus, fut-il a priori anodin, elle ressurgit de tréfonds insondables, faisant jaillir, tel le crocodile fond sur sa proie, une violence inéluctable et d'une intensité rare. Sans le savoir, -quoique ?-, le Pr. Magiste Mulière nous livre le fond de ces entrailles blessées et le visage sinistre de son impuissance.

UNE PAROLE SINGULIÈRE

     Nous souhaitions aborder la problématique sous un angle un peu particulier, en l'occurrence, du point de vue de celui - un homme, ici - qui commet ces violences. Un témoignage encore peu fréquent dans la sphère publique, qui s'attache plus souvent à relayer celui des victimes. Un moyen d'inviter le spectateur à chercher à comprendre les mécanismes qui induisent ces violences.

     Le protagoniste de ce monologue est conférencier, c'est un homme, un mari, un père de famille, c'est en réalité monsieur Tout-le-monde. C'est un blagueur, un homme viril. Il peut être charmant ou bien alors, plutôt grivois. Il est ce collègue de travail avec lequel on boit volontiers un café, ce cousin qui nous fait tellement rire, ou encore ce voisin discret...

    M. Tout-le-monde n'est pas psychopathe, il n'est pas forcément pervers, mais il est conditionné par des schémas culturels et prisonnier du carcan dans lequel il a grandi. Et, si les actes qu'il pose,  sont socialement admis comme banals, voire anodins, leur multiplication contribue à asseoir une domination tyrannique à laquelle la ''proie'' ne peut se dérober.

POURQUOI UN MONOLOGUE PORTÉ AU THÉÂTRE ?

     Parce que le théâtre a toujours été le lieu de prédilection de la représentation de la violence, et parce qu'à partir de cette violence qu'il donne à voir, le théâtre interroge. Évidemment, le théâtre contemporain semble bien loin du théâtre antique mais il a conservé cette capacité cathartique qui contribue à sans cesse nous interroger. Sur notre représentation du monde, notre rapport à l'autre, nos comportements et ce qui fait de nous les citoyens que nous sommes. Or si l’on considère que le processus qui nous intéresse ici, processus de déstabilisation de la victime, passe par la multiplication d’actes en apparence anodins, ne sommes-nous pas nous-mêmes, hommes et femmes confondus, auteurs, malgré nous parfois, de ces actes ? Voulons-nous alors incarner ces M et Mme Tout-le-monde et continuer d’adhérer implicitement à la transmission et à la perpétuation de comportements sexistes ordinaires et violents ?

    Ce monologue propose une plongée dans la psyché humaine. Il en dévoile ses contradictions, sa complexité, comment elle aspire un homme dans l'abîme qui se cache derrière les détails ordinaires. Le théâtre devient alors cet espace confiné où se rejouent inlassablement les traumas, indicibles parfois, comme  autant  de  batailles  à  livrer  et  d'occasions  de  se  prouver à soi-même que, coûte que coûte - intimidation, isolement et contrôle de l’autre -, il faut trouver le moyen d'exister.

Les violences conjugales ne sont ni l'apanage du sexe masculin, ou d'une domination masculine, ni des couples hétérosexuels. Par ailleurs, s'il a d'abord été écrit pour un homme, ce monologue pourra néanmoins être interprété par une femme.

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